Bonjour tout le monde. Dans la quatrième partie consacrée aux itinéraires nous avons vu quels pouvaient être les avantages du transit souple par rapport au transit rigide. Dans ce cinquième article je vous propose d’approfondir notre étude qui nous permettra ensuite de construire des automatismes capables de gérer le transit souple dans une gare de passage.
Problèmes liés au transit en gare
Le transit en gare soulève plusieurs difficultés liées aux caractéristiques propres du trafic ferroviaire en gare :
- Certains trains s’arrêtent en gare,
- D’autres trains traversent la gare sans marquer l’arrêt (Trains de marchandises par exemple ou trains rapides ne s’arrêtant pas dans les gares de moyenne importance),
- D’autres encore peuvent arriver dans un sens et repartir en sens inverse (Navette d’autorails par exemple),
- Des manœuvres peuvent être opérées dans les gares (Relais de traction ou inversion du sens de marche pour un même convoi).
La quatrième partie sur les itinéraires nous avait permis de savoir gérer en toute sécurité le trafic ferroviaire sur un faisceau de gare ou une zone d’aiguillages multiples mais nous nous bornions à prendre en compte un trafic fluide sans arrêt de train, ni manœuvre, ni changement de direction.
Dans cette étude nous verrons comment adapter le transit souple en tenant compte des caractéristiques propres à la gestion de la circulation en gare.
Au préalable je tiens à souligner que la réalisation d’une régulation en transit souple, même pour une gare de moyenne importance et même en se limitant dans le nombre d’itinéraires à réaliser est une tâche difficile, non pas qu’il s’agisse d’un exercice intellectuel de haute volée (une bonne dose de bon sens et d’esprit logique suffisent) mais parce que le tableau des itinéraires ainsi que la gestion des signaux lumineux d’approche sont complexes. Un inventaire très précis des cas de figure possibles doit être effectué au préalable de façon très minutieuse avant de commencer la construction de l’automatisme de gestion.
En outre, les lecteurs peu familiarisés avec la signalisation de la SNCF sont invités à consulter auparavant sur ce même site l'article consacré à la signalisation française car dans le présent article nous considérerons comme acquises toutes les connaissances relatives à ce sujet.
La gare de passage
Le Modèle que je propose s’appuie sur une gare de passage fictive avec 5 voies à quai. Je l’ai nommée gare de Fleury-en-Beaujolais. Une voie principale traverse la gare et permet le passage des trains de grande ligne sans arrêt (Fig 1) :
La gare est supposée se trouver quelque part entre Paris et Lyon. Venant de Paris, c’est-à-dire venant de l’ouest, nous avons uniquement la ligne principale avec ses 2 voies, paire et impaire.
Vers l’est, autrement dit vers Lyon, la ligne se divise en 2 bifurcations. La première qui se situe en aval de la gare que nous ne prendrons pas en compte dans notre étude. La seconde avec une voie unique, dénommée voie 3, en direction de Dôle. Cette destination apparaît sur les photos ci-dessous.
La figure 2 nous montre la sortie ouest de la gare de Fleury en direction de Paris. Les voies de circulation principale (La ligne Paris – Lyon) porte les numéros 1 et 2. Traditionnellement j’ai gardé la numérotation Sncf qui assigne aux voies venant de Paris un numéro impair et pair pour les voies remontant vers Paris. Ici 1 pour la voie venant de Paris et bien sûr 2 pour le sens Lyon-Paris :
En gare les voies sont numérotés de 1G à 5G, les voies 1 et 2 devenant en gare respectivement 3G et 4G.
Vers l’est la physionomie de la gare se présente bien différemment :
En effet, nous trouvons en sortie vers l’est la bifurcation vers Dôle (voie 3).
On notera en sortie de la voie 1G, à gauche en arrière-plan, 2 voies de service en impasse. Dans la gestion des itinéraires nous ne tiendrons pas compte de ces 2 voies ni de l’aiguillage qui permet de basculer la circulation des convois vers ces 2 voies en impasse.
Ces voies de service auront toute leur place dans un article futur qui sera consacré aux manœuvres en gare.
Dès à présent nous pouvons constater que nous sommes en présence d’une gare de moyenne importance. Rien à voir avec les faisceaux d’entrée ou de sortie de la gare de Lyon-Perrache (voir cet article). Néanmoins la configuration de l’automatisme de gestion des itinéraires sera pour nous un exercice difficile.
La figure ci-dessus nous montre une vue d’ensemble de la gare. A gauche, côté bâtiment voyageurs (BV), un autorail stationne sur la voie 1G tandis que sur la voie 5G arrive un second autorail en provenance de Lyon.
Les voies de la ligne principale (voies 1 et 2) permettent la traversée de la gare à vitesse élevée, aucun aiguillage n’étant franchi en position déviée. Les voies 1G, 2G et 5G, nécessitent, quant à elles, le franchissement d’aiguillages en position déviée. Cette contrainte a bien entendu une incidence directe sur le type de signal implanté à l’entrée des itinéraires.
La figure suivante nous affiche le tableau de contrôle optique (TCO) de la gare :
Pour chaque appareil de voie est indiqué à proximité sur le TCO le numéro de l’appareil (fond vert) ainsi que le numéro du relais d’enclenchement d’aiguillage (REA) sur fond rouge.
Toutes les voies de service sont à double sens. Les voies 1 et 2 de la ligne principale sont à sens unique, y compris en gare (Voies 3G et 4G). Normalement les voies 3G et 4G devraient être accessibles à contre-sens pour permettre tout type de manœuvre nécessaire (Prise en charge d’une locomotive en panne par exemple). Comme dans EEP les trains ne tombent jamais en panne nous nous passerons de cette possibilité. Plus prosaïquement cela nous épargnera la programmation de plusieurs itinéraires supplémentaires car comme vous le verrez nous aurons largement de quoi faire avec ceux que nous avons retenus.
Principe de fonctionnement
Gestion des itinéraires
Important : Un principe essentiel qui vaut au demeurant dans la vie courante dans beaucoup de domaines énonce ceci : Il n’existe pas de problèmes complexes qui ne puissent être décomposés en solutions simples.
Je ne sais si cet adage peut être applicable en toutes circonstances mais il me semble convenir parfaitement dans notre situation.
En effet, pour ce qui nous concerne nous avons une traversée de gare avec 2 faisceaux, l’un à l’ouest et le second à l’est pour les trains circulant dans le sens ouest-est. Pour les trains circulant en sens pair nous aurons bien évidemment le schéma inverse est-ouest.
Nous savons gérer les itinéraires sur un faisceau unique comme nous l’avons vu dans l’article consacré au transit souple. Décomposons donc notre faisceau de gare en 2 faisceaux simples :
- Faisceau de zone 1 à l’ouest,
- Faisceau de zone 2 à l’est.
Le découpage du gril de gare en deux zones de faisceaux conduit à traiter chaque itinéraire non comme un itinéraire global programmé en une seule séquence du point d’entrée jusqu’au point de sortie mais comme 2 itinéraires successifs traités autant que faire se peut comme itinéraires indépendants.
Autrement dit cela signifie que la gestion de la totalité de l’itinéraire pour un train traversant la gare sans s’y arrêter se fera en deux temps :
- Par exemple, le train en approche sur la voie 1 Ouest appelle l’Automatisme de Gestion d’Itinéraires (AGI) pour permettre le tracé uniquement dans le faisceau Ouest,
- Une fois l’itinéraire ouest exécutable, l’AGI établit le tracé de l’itinéraire de sortie en zone Est, entre la sortie de gare et le signal 31, cette fois-ci dans le faisceau Est.
Cette programmation en deux temps est en fait plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord. En effet les 2 phases énoncées ci-dessus ne peuvent se dérouler telles quelles que dans la mesure où les itinéraires demandés en entrée zone 1 Ouest, comme en sortie zone 2 Est sont immédiatement exécutables dès lors qu’aucun itinéraire incompatible avec ceux demandés n’est en cours d’exécution dans chacune des deux zones.
Revenons donc à l’appel d’itinéraire pour la zone 1 Ouest et considérons maintenant qu’il existe une incompatibilité. Le train sera donc arrêté à hauteur du signal carré 30 tant que l’incompatibilité perdurera.
Dans ce cas de figure l’activation du tracé de sortie en zone 2 serait aberrante car elle conduirait à bloquer la réalisation d’autres itinéraires dans cette même zone 2 alors que le train est arrêté à l’entrée de la zone Ouest. Une telle conception dans la programmation des itinéraires induirait inévitablement une perte importante de fluidité de circulation, surtout s’il s’agit de gares à haute densité de trafic.
Cela signifie que l’établissement de l’itinéraire en zone de sortie ne peut se faire que si l’itinéraire en zone d’entrée a été activé.
Important : Autrement dit, pour les trains ne marquant aucun arrêt dans la gare de passage, l’établissement de l’itinéraire de sortie est strictement subordonné à l’établissement de l’itinéraire d’entrée.
L’organigramme ci-dessous en figure 7 schématise ce principe :
Note : Le déroulement de la procédure des itinéraires d'entrée comme de sortie est en soi complexe. Cet organigramme vise cependant à schématiser les étapes de la séquence conduisant à l'enclenchement des itinéraires. Aussi, afin de ne pas surcharger le tableau, les flèches d'interaction entre l'automatisme de gestion des itinéraires et les effets sur les trains n'ont pas été affichées.
De même, pour les états des signaux S20 et S30 toutes les possibilités n'ont pas été representées lorsque les signaux sont ouverts. Le signal au vert (voie libre) étant le plus parlant a été le plus souvent utilisé. Il est bien évident que selon le contexte du trafic ferroviaire le signal S30, par exemple, peut aussi bien être à l'avertissement orange avec en plus un ralentissement si l'arrêt en gare se fait sur une voie déviée.
Bien évidemment le principe de subordination de l’itinéraire de sortie par rapport à celui d’entrée joue quel que soit le sens de circulation, la zone 2 devenant alors zone d’entrée et la zone 1 celle de sortie.
Ainsi donc, dans la séquence d’établissement d’un itinéraire ayant pour entrée la zone 1 et pour sortie la zone 2, l’AGI va d’abord traiter la compatibilité de l’ ITN demandé uniquement pour la zone 1, puis si cette opération autorise l’établissement de l’itinéraire d’entrée, l’automatisme traite dans un second temps la sortie en zone 2 pour les trains traversant la gare sans marquer d’arrêt.
Pour les trains s’arrêtant en gare le problème ne se pose pas. L’ AGI va vérifier si le train doit s’arrêter en gare. Si tel est le cas la procédure d’enclenchement et d’établissement de l’itinéraire est immédiatement opérée.
Le tableau en figure n° 8 nous donne les 2 cas de figures possibles :
- Soit l’itinéraire demandé prévoit l’arrêt en gare et dans ce cas seule la procédure d’établissement d’itinéraire en Z1 est initiée. La procédure de sortie en Z2 sera lancée ultérieurement de façon totalement indépendante par rapport à Z1,
- Soit l’itinéraire ne prévoit pas d’arrêt en gare et dans ce cas Z1 est traité en premier lieu. Si ITN2 est enclenché dans le faisceau Z1 l’automatisme active alors la procédure similaire en sortie Z2. Autrement dit la sortie en Z2 est subordonnée à l’établissement de l’itinéraire en Z1.
Cette articulation présente le double avantage :
- De permettre au train d’entrer en Z1 même si l’ITN de sortie en Z2 n’est pas disponible. Le train sera alors arrêté en gare dans l’attente de l’ouverture de l’itinéraire demandé.
- De ne pas bloquer inutilement les autres itinéraires en Z2 pour le cas où l’ITN en zone 2 serait libre et donc enclenché tandis que l’ITN en Z1 serait indisponible. Nous aurions une gestion du trafic pour le moins curieuse puisqu’un train arrêté en Z1 pour cause d’incompatibilité bloquerait tout itinéraire en Z2 alors que lui-même ne serait pas en mesure d’entrer en Z2.
Comme je l’ai indiqué plus haut la gestion des itinéraires en deux zones distinctes permet dans une certaine mesure de traiter une demande d’itinéraire en 2 temps comme si ces itinéraires étaient totalement indépendants l’un par rapport à l’autre. Ceci est rigoureusement exact pour les trains s’arrêtant en gare. Pour les trains en transit sans arrêt il convient de nuancer cette affirmation dans la mesure où la gestion de la signalisation d’approche ne peut en aucune manière être traitée de façon réaliste sans intégrer la combinaison Z1 et Z2 simultanément. C’est là, assurément, le problème majeur de la programmation du transit en gare dans EEP qui mérite un développement détaillé.
Gestion de la signalisation
Rappel sur la signalisation
Nous traiterons dans ce paragraphe uniquement de la signalisation d’entrée en gare par la voie 1. Il est bien évident que le problème posé et les réponses apportées sont identiques pour l’entrée en zone 2 Est, tant par la voie 2 que par la voie 3.
Observons tout d’abord le faisceau d’entrée ouest de la gare :
La figure n° 9 nous montre l’entrée en Z1 ouest. Bien que le gril d’entrée soit des plus simples avec une seule voie d’entrée (Voie 1) et une distribution possible sur 4 voies en gare (V1G, V2G, V3G et V5G) nous allons vite constater que la programmation des signaux n’en est pas moins très complexe pour autant.
Auparavant faisons un court rappel sur les types de signaux lumineux en jeu ici.
Notre faisceau d’entrée comporte un tracé direct Voie 1 –> Voie 3G ne nécessitant pas de ralentissement hormis celui imposé par l’arrêt éventuel en gare.
Pour les autres itinéraires les trains franchissent un ou plusieurs aiguillages en position déviée. Nous conviendrons ici que le franchissement peut être effectué à 60 km/heure. Il est donc nécessaire d’implanter un ralentissement 60 km/h doublé d’un rappel de ralentissement à l’entrée de la zone 1 d’itinéraires.
Tout d’abord le signal d’annonce. Celui-ci (Fig 10) est un signal de type F, implanté à l’entrée du canton précédant le signal d’entrée d’itinéraire. Dans le cas présent le signal affiche voie libre. Ce serait le cas pour les trains en approche et devant traverser la gare en tracé direct par la voie 3G.
Le signal d’exécution qui est en même temps le signal d’entrée d’itinéraire est un signal de type G (Figure 11). Par défaut, en l’absence de tout appel d’itinéraire, ce signal est au carré, c’est-à-dire qu’il affiche 2 feux rouges.
Seul un appel d’itinéraire permettra d’ouvrir ce signal qui affichera alors l’état qui convient en fonction de l’itinéraire tracé.
Dans notre réseau support le dispositif de signalisation se présente donc comme suit lorsqu'aucun train n'est en approche :
Le signal BAL (S102) est ouvert "Voie libre". C'est l'état normal d'un tel signal dès lors que les 2 cantons en aval sont libres. Dès lors qu'aucun itinéraire n'est programmé, le signal S30 est fermé au carré et le signal S33 affiche alors l'avertissement.
- Signal 102 : signal à 3 feux de bloc automatique lumineux (BAL) en position voie libre (VL). Il s'agit de l'état normal d'un signal BAL dès lors que les cantons c102 et c33 en aval sont libres.
- Signal 33 : signal d’annonce de ralentissement 30 km/h à feu fixe et 60 km/h à feu clignotant. Dans le cas présent aucun itinéraire n'étant programmé il affiche seulement l'avertissement (Feu jaune) qui indique que le signal suivant est fermé et que le train devra impérativement s'arrêter.
- Signal 30 : signal d’entrée d’itinéraire pour la zone OUEST Z1. Ce signal est toujours fermé au "Carré" lorsqu'aucun itinéraire n'est enclenché.
- Signaux S 20 – S 21 – S 22 – S 24 : signaux de sortie de gare et d’entrée d’itinéraire dans la zone EST Z 2 respectivement pour les voies 1G, 2G, 3G et 4G. Pour ne pas surcharger inutilement le croquis nous nous limiterons à représenter les signaux S20 et S22 qui seuls nous seront utiles pour la suite de l'exposé.
- Contacts d’appel d’itinéraires situés juste à l’entrée du canton c102. Les autres contacts au droit des signaux ici représentés ne sont pas matérialisés, toujours dans un même souci de clarté.
Gestion de la signalisation dans les cas particuliers
Les signaux S33 et S30 sont liés dès lors qu'ils affichent une annonce de franchissement en voie déviée avec ralentissement à 30 ou 60 km/h. En effet S33 constitue l'annonce de ralentissement et S30 le rappel de ralentissement qui impose que le train soit déjà à la vitesse réduite à hauteur de ce signal. Dans la programmation d’ouverture des signaux il va donc falloir tenir compte de cette liaison entre les 2 signaux. Toutefois, cette liaison peut poser problème lorsque l'itinéraire en voie déviée n'est pas exécutable immédiatement pour cause d'incompatibilité avec un autre itinéraire en cours d'exécution. C'est pourquoi il convient impérativement de distinguer deux cas de figure selon que l'itinéraire demandé est immédiatement exécutable ou pas. Ce sont ces deux cas que nous allons voir à travers le cas concret 1.
Cas concret n° 1
L'itinéraire demandé est immédiatement exécutable
Voyons maintenant ce 1er cas de figure. En l’occurrence un train vient d’entrer dans le canton c102 appelant l’itinéraire V1 – V1G :
Le train se trouve dans le canton c102. Le sémaphore S 102 est fermé. L’itinéraire demandé étant immédiatement exécutable le tracé s’est affiché sur le TCO. Le signal S 33 affiche l’annonce de ralentissement et S 30 affiche en plus du rappel de ralentissement l’avertissement, ce qui est tout à fait normal puisque le signal ITN Z2 (S 20 ici pour la voie 1G) est fermé.
Nous sommes ici en face d’un cas de figure simple.
L'itinéraire demandé n'est pas immédiatement exécutable
Voyons maintenant avec la figure 14 ci-dessous ce qui se passerait si l’itinéraire V1 -V1G n’était pas exécutable immédiatement du fait d'un autre itinéraire en cours d'exécution :
- S 102 est fermé après le passage du train, ce qui est tout à fait conforme.
- S 30 est au carré puisque l’itinéraire demandé n’est pas accessible dans l’immédiat.
- S 33 annonce le ralentissement puisque l’itinéraire demandé est en tracé voie déviée mais affiche aussi l’avertissement signifiant au mécanicien que le prochain signal est fermé et qu’il devra impérativement s'arrêter.
Pendant ce temps l’automatisme tourne et opère une vérification de compatibilité sur la ligne d’itinéraire V1-V1G à chaque passage du commutateur mobile d’itinéraires (CMI). Pour un rappel sur l’automatisme, vous pouvez revoir cet article.
Lorsque l’itinéraire qui interdit l’enclenchement demandé est libéré, l’automatisme enclenche alors ITN V1-V1G, positionne les appareils de voie et ouvre les signaux dans l’état qui convient.
Deux situations sont alors possibles :
- Le train est encore dans le canton c102 et nous sommes renvoyés à l’affichage des signaux tel qu’il apparait dans la figure 13 ci-dessus, autrement dit à l'affichage normal avec S33 en ralenti et S30 en rappel de ralentissement.
- Entre-temps, le train est passé dans le canton c33 (Qu’il soit à cheval sur c102 et c33 ne change rien au problème).
Dans ce second cas de figure si la programmation de l’itinéraire ne tient pas compte de la position du train nous nous retrouvons avec une anomalie flagrante dans l’affichage du signal d’annonce S33 comme nous le montre la figure 15 ci-dessous :
S33 est ouvert au ralenti. Concrètement, la figure 15 nous montre de façon évidente que la sécurité arrière du train n’est plus assurée. Que s’est-il donc passé ? l’explication tient au fait que l’automatisme de gestion tel que nous l’avons conçu ne connaît que 2 états possibles :
- Ou l’itinéraire est inaccessible et les signaux affichent les états tels qu’ils apparaissent dans la figure 14 ci-dessus.
- Ou l’itinéraire est immédiatement réalisable et alors l’AGI fait basculer les signaux dans les états affichés à la figure 13 sans se préoccuper de savoir où se trouve le train à ce moment précis. Nous obtenons alors un fonctionnement intempestif de S33.
Pour obtenir un affichage conforme à la réalité il importe donc de savoir où se trouve le train en cas d’activation différée de l’itinéraire demandé. Cela nécessite donc d’intégrer un dispositif qui assurera la détection à tout moment de la position exacte du train. Un tel dispositif permet alors un affichage correct de la signalisation. Dans le cas présent l’AGI ne devra en aucune façon agir sur le signal S33 dès lors que celui-ci aura été franchi par le convoi.
Ainsi la figure 16 rend-elle compte de l’exacte configuration de la signalisation dans le cas présent :
- Le signal BAL S102 est à l’avertissement,
- Le train vient de franchir S33 mettant ce signal au sémaphore (feu rouge dans la terminologie SNCF),
- Le signal d’entrée d’ITN est au ralenti doublé de l’avertissement qui annonce S20 au carré.
Nous avons maintenant une signalisation qui assure la sécurité du train. Le signal S33 est fermé et protège ainsi l’arrière du convoi en interdisant tout risque de rattrapage par un second convoi.
Cas concret n° 2
Dans le cas d'une programmation d'itinéraire en tracé direct sans arrêt en gare l'enclenchement de l'itinéraire opère sur les signaux S33 - S30 - S ITN Z2. En effet S ITN Z2 est le signal qui autorise le passage du train dans la zone Est en sortie de gare (Voir ci-dessus la figure 6). Cette triple combinaison peut poser problème dans certains cas. Examinons tout d'abord le cas de figure dans lequel un train évolue seul. L’itinéraire V1 – V3G est établi en tracé direct, sans arrêt en gare et avec sortie ouverte en zone Est. Ce tracé n'impose aucun ralentissement en l’absence d’aiguillages en position déviée. Nous supposerons que les trains sont autorisés à traverser la gare à la vitesse maximale de 120 km/h en raison d’un tableau indicateur de vitesse (TIV), non représenté ici dans le schéma ci-dessous, implanté dans le canton c33
Tracé direct sans arrêt en gare : Cas d'un train évoluant seul
Étudions maintenant le cas d'un train entrant en c102 et appelant l'itinéraire V1-V3G-Z2. En effet, s'agissant d'un convoi ne s'arrêtant pas en gare de Fleury, le tracé doit s'établir en totalité comme le montre la figure 17 ci-dessous, du moins dès lors qu'il n'existe pas d'incompatibilités avec d'autres itinéraires en cours d'exécution. Observons par la même occasion avec les figures 18 et 19 la commutation des signaux au fur et à mesure de la progression du train.
Les figures 17, 18 et 19 nous rendent compte de l’affichage de la signalisation au fur et à mesure de la progression du train de canton en canton, aussi bien dans la zone d’approche que dans la zone de transit d’itinéraire Z1 Ouest. Ce sont ces états de signalisation que S30 et S33 devront impérativement afficher en cas d’ouverture différée de l’itinéraire de sortie en Z2 Est :
L'affaire se complique quelque peu dès lors que le signal de sortie S22 est fermé au carré pour cause d'incompatibilité avec un autre itinéraire programmé en Z2 EST. Il serait possible d'arrêter le train à hauteur de S30 en attendant l’ouverture de S22. Une telle option serait aberrante car elle contreviendrait au principe de fluidité du trafic en bloquant par exemple un second train se dirigeant vers la voie V1G libre et qui pourrait y accéder sans problème. C'est pourquoi dans la mesure où aucune incompatibilité n'existe au niveau de Z1 OUEST, l'application du principe de fluidité impose que le train soit autorisé à progresser jusqu'en S22. La figure 20 nous donne la configuration des signaux autorisant la progression du train jusqu'au signal S22 , signalisation tout à fait classique en BAL avec l'avertissement en S30 qui annonce la fermeture de S22 au carré.
Examinons maintenant un cas de figure précis qui nous montrera les dysfonctionnements auxquels nous nous exposerions si la position des convois ferroviaires n’était pas prise en compte.
Cas de deux train évoluant simultanément avec fermeture de l'itinéraire de sortie
Nous avons jusqu’ici ici un fonctionnement parfaitement normal de l’automatisme de gestion des itinéraires. A ce stade plus aucun itinéraire n'est programmé. Le train 1, au fur et à mesure de sa progression, a commuté les signaux S102, S33 et S30 dans les états affichés dans la figure 20A ci-dessus. Cette configuration permet alors l'entrée d'un second train dans les cantons c102 et c33. Toutefois, dans le cas présent ce second train ne serait pas autorisé à aller au-delà de S30 sauf s'il devait se diriger vers V2G. En effet le train 1 n'a pas dégagé par l'arrière la zone d'aiguillage Ag7 et interdit de ce fait toute programmation d'itinéraire vers V1G ou V2G.
Pour cela faisons intervenir un second train, soit un autorail qui se dirige vers la voie V1G en gare. Cet autorail est entré dans le canton C33. Auparavant, en pénétrant dans le canton c102 il a appelé l'ITN V1-V1G. la règle d’incompatibilité du fait de l'occupation de Ag7 n'autorisant pas l'établissement de l'itinéraire demandé par l'autorail maintient S30 au carré. Le train 2 est simplement autorisé à exécuter l'itinéraire partiel jusqu'en S30 comme le montre le tracé en jaune (Itinéraire enclenché).
La séquence suivante illustrée par la figure 21 montre que le train 1 a libéré l’aiguillage Ag 7, repéré dans le cercle rouge. Maintenant plus rien n’empêche l'établissement de l’itinéraire V1-V1G. Nous sommes ici dans le laps de temps très court où aucun nouvel itinéraire n'est enclenché. Deux situations peuvent se présenter :
1 Le signal S22 s'ouvre avant l'ouverture de S30 au profit de l'autorail autorisant ainsi le train 1 à poursuivre sa route.
2 Le signal S30 s'ouvre avant l'ouverture de S22 et permet ainsi à l'autorail d'accéder à la voie 1 en gare.
Examinons ces deux cas en commençant par le second.
La figure 22 ci-dessous nous montre la suite logique : l’incompatibilité ayant disparu, l’itinéraire de l’autorail est tracé. Le signal S30 s’ouvre en affichant le ralentissement avec avertissement puisque l’autorail doit s’arrêter en gare. La signalisation est donc tout à fait conforme. La programmation de l'itinéraire en gare tient compte ici de la position de l'autorail permettant ainsi d'éviter l'anomalie observée dans le cas concret 1 ci-dessus.
Ici tout se déroule normalement sans la moindre erreur et peut de ce fait nous faire supposer que notre programmation est parfaite.
De fait il n’en n’est rien car l’illusion tient au fait que l’ITN du train 2 s’est ouvert avant celui du train 1 permettant ainsi la formation et l’ouverture sans erreur de l’itinéraire demandé par l’autorail.
Revenons maintenant à la situation telle qu’elle apparaît à la figure 21 et supposons qu’à l’inverse de ce que nous venons de voir ce soit l’itinéraire de sortie en Z2 du train 1 qui s’ouvre en premier. Si nous ne prenons pas en compte la position exacte du train 1 nous obtenons alors la configuration de signalisation telle qu’elle est affichée dans la figure 23 ci-dessous :
L’erreur provient du fait que l’AGI a établi l’itinéraire V1 Entrée-V3G-V1 Sortie sans tenir compte de la position du train 1 à ce moment-là. De ce fait il a commuté la signalisation comme si le train se trouvait encore dans la zone d’appel ITN en c102, donc avec les signaux S30 et S33 DEVANT le train, sauf que dans le cas présent S30 et S33 sont DERRIÈRE le train 1.
On aboutit ainsi à une énorme erreur de programmation avec trois lourdes anomalies :
- L’autorail est aiguillé vers V3G au lieu de V1G qui était sa destination originellement assignée,
- La protection arrière du train 1 n’est plus assurée et les risques de rattrapage par le train 2 élevés,
- La protection arrière du train 2 n’est pas davantage assurée avec la mise au vert du signal S33.
Important : La détermination de la position du train est primordiale dans la gestion du transit en gare. Ne pas la prendre en compte conduit inévitablement à des anomalies dans la gestion du trafic ferroviaire.
Ce constat nous impose l’impérieuse nécessité de mettre en place un dispositif de détection de présence de trains pour chaque canton de la zone d’approche. L’exacte localisation du train autorisera ou interdira selon le cas le changement d’état des signaux S30 et S33.
Nous verrons dans la partie Application pratique du transit souple en gare dans EEP (article n° 6) comment en version « mécanique » il est possible de réaliser concrètement la détection de voie. En l’occurrence nous utiliserons pour cela des signaux invisibles type « Arrêt – Marche », correspondant parfaitement aux deux états logiques que sont :
- Canton libre,
- Canton occupé.
Ces signaux invisibles ont une fonction de détecteurs d’occupation de voie tels qu’ils existent dans la réalité.
Le prochain article ne se limite pas au seul problème de la signalisation du transit en gare mais traite tous les points importants pour réaliser un automatisme fiable, capable de gérer un trafic dense dans une gare de passage.
3 - Conclusion
Cet article est à présent terminé. Si vous avez des questions ou des suggestions, n’hésitez pas à contacter François par mail.
Merci pour vos commentaires utiles. Amusez-vous à lire un autre article.
L’équipe eep-world.com.